Au réveil, je me suis empressé de prendre des notes, afin de ne pas oublier.
Et maintenant, je m'emploie à le retranscrire. Voici déjà la première partie, en espérant vous divertir.
Sortir du sommeil pour trouver le chaos. Ce sont les cris qui l'ont éveillé, plus que la cloche d'alarme.
Rendant grâce à son entrainement, il passe instantanément du repos à l'action. Inutile de se poser des questions sur le pourquoi de la situation. Ils ont été retrouvés, et l'ennemi entend bien leur faire payer...
Il passe en mode automatique. À gestes mécaniques, l'homme passe un minimum de vêtements, ceint dague et épée, puis s'engage en courant dans une coursive. Son objectif: le pont. Pressant le pas dans l'obscurité, il en croise d'autres qui comme lui se dirigent vers l'endroit où la bataille fait rage. Une pensée pour eux, une pincée de culpabilité. Quelque part, c'est à lui qu'ils doivent le sort qui leur est réservé, bien qu'ils s'y soient volontairement engagés.
Plus tard, plus tard, le temps des regrets n'est pas encore venu.
Il s'arrête un instant, au bas de l'échelle. Arrivés avant lui, des soldats improvisés montent déjà au combat. Quand vient son tour il grimpe rapidement, barreau après barreau, sentant les muscles de ses bras rouler sous sa peau. Une fois en haut, d'une poussée, il jaillit de l'écoutille, roule sur les planches, se relève. Dans le même mouvement il tire ses armes.
Du regard, il évalue la situation, ses yeux s'étant rapidement adaptés à la pâle lueur de l'aube. C'est un navire de guerre qui les a abordés, comme de juste. Pour en avoir entrainé beaucoup, il sait que les combattants qui leur sont opposés ne valent pas grand chose, trop habitués à la vie dans leur pays sans guerre, plus occupés à opprimer la populace qu'à lutter pour survivre. Mais il ne sous-estime pas la menace, car de son côté il ne dispose que d'une poignée de marins non aguerris. Jeunes, pour la plupart. Une lutte perdue d'avance... Chacun toutefois vendra chèrement sa peau.
Plusieurs assaillants ont déjà pris pied, défendant les cordes le long desquelles d'autres progressent. Il sait que cette tête de pont n'est là que pour assurer la mise en place de passerelles de bois. Après viendra le gros de l'armée, et les défenseurs ploieront sous le nombre. Aucun coup de canon n'a été tiré... si on ne désire pas les couler, c'est donc la capture qui est visée. Est-ce une chance ou une malédiction pour ses compagnons qu'il soit le seul à disposer des informations recherchées? Ça non plus il ne faut pas y penser.
Le tour d'horizon effectué, vient le temps de la boucherie. Accompagné des marins les plus prompts, il se précipite sus à l'ennemi. Le temps se fige juste avant l'engagement. Une seconde s'étire, qui restera gravée dans la mémoire des survivants. D'un côté, les soldats du royaume, tabard or et argent sur leurs protections légères. En position défensive, un cordon s'apprête à protéger ceux qui s'affairent pour monter à bord et semer la mort. En face d'eux, un groupe de marins dépenaillés, de bric et de broc équipés, portant épissoirs, haches, coutelas et épées, montant à l'assaut en hurlant pour se donner du courage.
C'est maintenant la curée. Les lames s'entrechoquent dans un fracas métallique. L'odeur cuivrée du sang chaud fraichement versé déjà emplit les narines tandis que retentissent les premiers cris d'agonie.
Changé en machine implacable, il pare, feinte, tranche et taille. Emporté par la vague de combattants, il avance vaille que vaille. Les coups sont précis, calculés pour tuer rapidement ou mutiler gravement avant de passer à l'adversaire suivant.
Au début de la bataille, c'est la fureur des marins qui l'emporte. La force de leur élan rompt la digue de soldats et leur permet de déborder le barrage d'acier. Quelques uns parviennent même à passer la ligne suffisamment vite pour aller trancher un cordage et faire choir une grappe d'assaillants dans les flots, bref coup d'éclat dont les auteurs sont généralement récompensés par un coup d'épée dans le dos avant même d'avoir pu savourer leur triomphe.
Puis au fil du temps, à mesure que l'ennemi s'organise, la tendance s'inverse. Les militaires sont de plus en plus nombreux, tandis que la quantité de défenseurs s'amenuise. Lorsqu'enfin les passerelles relient les deux navires, c'est terminé. Submergés, les marins ne peuvent que reculer. Les soldats se mettent en rang et progressent. Il cessent de tuer pour prendre un maximum de prisonniers.
« NAYM, SAUTEZ BON SANG, IL NE FAUT PAS QU'ILS VOUS AIENT! »
C'est le capitaine qui a crié. Un homme plein de bon sens, même s'il en a peut-être manqué en s'engageant dans cette aventure. Naym devrait tenir compte de son injonction, mais tout à son combat, il n'entend pas. Le capitaine alors, une épée dans chaque main, fonce vers lui dans la mêlée, sans prendre garde aux blessures qu'il reçoit. Tous deux se trouvent près du bord... Il n'y a pas à tergiverser. Avec dans le regard une lueur de regret, le capitaine achève l'adversaire de Naym, puis assomme ce dernier du pommeau de son épée et le passe par dessus la lisse.
« Désolé mon gars, mais ça vaut mieux, tu t'en rendras compte si tu survis. »
Tels furent les derniers mots que Naym entendit avant de sombrer...
Le voilà ton rêve-univers... la suite ! ^^
bisoux!