Vendredi 28 novembre 2008 à 23:49
Cela faisait trois semaines que je séjournais chez le vieil homme. Je lui prêtais la force de mes bras vigoureux afin d'effectuer les travaux quotidiens que son âge ne lui permettais plus d'assumer, en échange du gîte, du couvert, et de ses enseignements. Son esprit encore vif et alerte était en effet une véritable mine d'or, empli de contes, de légendes et de nombreuses connaissances sur ces terres, qu'il partageait avec un plaisir manifeste. Il affectionnait également les énigmes, mais pas n'importe lesquelles. Celles qu'il posait contenaient toujours une leçon, et les résoudre apportait à qui s'y attelait d'importantes informations sur soi-même, sur le fonctionnement de l'esprit, sur la marche des choses...
J'appris beaucoup auprès de lui.
Ce matin là, alors que je travaillais à retourner un carré de terre, il vint à moi, s'appuyant comme à son habitude sur le bâton noueux avec lequel il compensait sa légère claudication. Lorsque je l'aperçus, je posai ma bêche et me rendis à sa rencontre, afin de lui épargner un trajet pénible et inutile. Il m'accueillit d'un sourire et me dit:
« Petit, un grand taureau noir dont j'ai fait l'acquisition récemment s'est enfui de l'étable. Je te serai reconnaissant si tu pouvais me le retrouver. Je suis sûr que tu peux mener cette tâche à bien. »
Alors qu'il prononçait ces mots, son œil sembla pétiller de malice, comme lorsqu'il posait une énigme particulièrement instructive. Je ne le connaissais que depuis très peu de temps, et s'il était prodigue quand il s'agissait de conter des histoires, il était en revanche très avare de renseignements sur lui-même, aussi ne savais-je en vérité presque rien de sa vie. Pourtant, j'avais été dès le départ séduit par le personnage, et lui avais accordé ma confiance sans retenue. Je n'avais aucune raison de procéder différemment cette fois-ci, aussi ne lui posai-je aucune question et me contentai-je d'acquiescer avant de partir en quête de l'animal échappé.
Je quittai la petite propriété en suivant un petit sentier pierreux qui traversait plusieurs champs et menait à la forêt. Une part de moi-même sentait que la mission qui m'avait été confiée était plus qu'il n'y paraissait. Habitué alors aux jeux d'esprit de l'ancien, je savais devoir me laisser porter par mon intuition plutôt que par la raison. Je m'ouvris à cette voix intérieure que je connaissais bien désormais, et la laissai me guider. Contre toute logique, je décidai de ne pas arpenter les prés, qui auraient pourtant été la destination la plus évidente pour un tel animal. Ce fut vers la forêt que mes pas m'emportèrent.
L'endroit était merveilleux, comme tiré d'un conte. Je pris un immense plaisir à naviguer presque au hasard à l'ombre des arbres majestueux. La doucereuse odeur de l'humus, les branches tombées et les feuilles mortes crépitant sous mes pieds, le chant des oiseaux nichant dans les branchages... absorbé par les plaisirs s'offrant à mes sens, je ne prenais pas garde à la direction dans laquelle j'avançais. Je ne repris conscience qu'en parvenant face à un ruisseau. L'eau en s'écoulant émettait une mélodie cristalline. Un rayon de lumière, parvenu à se glisser entre les feuillages, en faisait miroiter la surface, achevant de donner à la scène une aura de magie féérique.
Et il était là.
Noir comme l'ébène, massif, dégageant une impression de puissance hors du commun, le taureau s'abreuvait.
Incapable de bouger, retenant mon souffle pour ne point le troubler, je restai à le contempler un long moment. Puis il dû sentir ma présence, car il se tourna vers moi et commença à souffler par les naseaux tout en grattant le sol de son antérieur.
C'est alors que ma propre réaction me surprit. Au lieu de m'éloigner doucement ou de prendre carrément mes jambes à mon cou, je m'approchai de l'animal en prononçant des paroles apaisantes dans cette langue chantante dont l'ancien m'avait enseigné les rudiments. À mesure que j'avançais, le taureau se calmait, cessant tout d'abord de frapper du sabot, puis s'immobilisant tout à fait comme j'arrivais suffisamment près pour le toucher.
Nos regards se croisèrent, et je n'aurais su décrire alors l'émotion qui me prit. Mais j'eus tout à coup la certitude de ce que je devais faire. Me plaçant à côté de lui, je lui flattai l'encolure de la main, puis l'enfourchai. Il se mit en marche, doucement tout d'abord, avant d'accélérer et de se lancer dans une course folle. J'ignore comment je fis pour rester sur son dos. Durant cette extraordinaire chevauchée, je n'étais plus un homme mais un esprit de la nature, fort, inarrêtable, libre... si libre...
Évitant à chaque fois de justesse les nombreux troncs d'arbres, nous traversâmes la forêt à toute allure. Je ne pensais pas qu'il fût possible d'aller plus vite, mais ma fantastique monture me détrompa dès que nous arrivâmes en terrain dégagé. Nous galopâmes ainsi, sans but, ivres de liberté, jusqu'à la tombée de la nuit. Lors, le taureau rentra de lui même à son étable, au pas.
Je descendis de sur son dos, les jambes cotonneuses et l'esprit encore gris. Mon corps s'occupa seul de nourrir et d'abreuver l'animal, puis de se rendre dans la maisonnette du vieil homme.
Celui-ci m'attendait, assis devant le feu, un bol de soupe fumant à la main.
Sans un mot, il me le tendit, puis patienta jusqu'à ce que je recouvre mes sens.
Alors il me dit:
- Je savais bien que tu y arriverais. Alors dis-moi, qu'as-tu ressenti lorsque tu l'as trouvé?
- C'est une bien étrange émotion qui m'a pris. J'ai eu l'impression de contempler une force de la nature, sauvage, indomptable. Une puissance formidable issue de la terre elle-même, faite pour être libre, et qui n'a pas sa place enchaînée dans le monde des hommes. Je ne voulais plus le ramener. Je sentais sa rage, sa frustration, son désir de partir au loin pour trouver une terre à sa mesure, sa mélancolie de se trouver ici-bas.
- Et selon toi, pourquoi est-il rentré ici après votre course?
- Je suppose que pendant cette journée, il a pu un temps se trouver lui-même, savourer l'intense plaisir de se sentir libre, mais qu'il considère malgré tout cet endroit comme son foyer. Aussi, épuisé, y est-il revenu se reposer.
- Une dernière question, s'il était si avide de se débarrasser du joug des hommes, pourquoi à ton avis t'a-t-il laissé, invité peut-être même, à le monter?
Je réfléchis quelques instants. La dernière pièce du puzzle se mit en place dans ma tête. Je répondis:
- Je pense... je pense que la raison en est que lui et moi ressentons la même chose, et qu'il a perçu mon désir comme j'ai perçu le sien.
Lorsqu'il me sourit alors, son visage sembla s'illuminer.
- Si tu as compris cela, alors je n'ai plus rien à t'apprendre jeune homme. Demain je te rémunèrerai pour les services que tu m'as rendu, et tu pourras reprendre la route. N'aie crainte, je suis persuadé que tu trouveras ce que tu recherches.
- Mais... je n'ai pas besoin de rétribution vous savez. Vous m'avez tant apporté. Et comment allez-vous faire pour...
- Pas de discussion petit. Mes bavardages quotidiens m'ont fait autant, voire même plus plaisir qu'à toi. Ils ne constituent en aucun cas un gage satisfaisant. Et je me débrouillerai très bien tout seul, comment crois-tu que je faisais avant que tu n'arrives? Allez, tu es éreinté, va donc dormir maintenant.
Dès qu'il eut prononcé ces mots, je n'eus plus de volonté. Tout juste parvins-je à lui souhaiter une bonne nuit d'une voix pâteuse avant de rejoindre mon lit et de sombrer dans un sommeil sans rêves.
Le lendemain, quand je redescendit, nulle trace de l'ancien. Sur la table était posé un balluchon contenant quantité de vivres, une somme d'argent correspondant au salaire d'un garçon de ferme employé durant un mois, et un message.
« Je n'ai jamais aimé les adieux, aussi ne me trouveras-tu pas aujourd'hui, ni demain, ni même si tu me cherchais dans ce but toute ta vie durant. Ne me fait surtout pas l'affront de refuser ce que je t'offre sans quoi les échos de mon mécontentement te poursuivront longtemps. Va, trouve ta place maintenant. Mes pensées et ma bénédiction t'accompagnent, et peut-être cela te sera-t-il plus utile que tu ne peux l'imaginer. Au revoir petit.
Asarlaí »
Les larmes aux yeux, je rangeais soigneusement les cadeaux du vieil homme avant de quitter la propriété. Si je m'étais retourné, peut-être l'aurais-je aperçu, forme voutée appuyée sur son sempiternel bâton, m'adressant un dernier sourire emprunt de bonté à travers la brume matinale. Mais je ne me retournai pas.
Quelques temps plus tard, je dinai à la table d'une famille paysanne dont j'avais sorti le jeune fils d'un mauvais pas et qui me remerciais en m'offrant le repas ainsi qu'un abri pour la nuit. Au cours de la soirée, je leur fis part de l'endroit où j'avais passé les trois semaines les plus inoubliables de mon existence, et ils me regardèrent avec des yeux ronds d'étonnement.
Ils me dirent que j'avais sans doute été victime d'une bien étrange plaisanterie, ou d'un délire causé par la fièvre. En effet, d'aussi loin que leur mémoire pût remonter, et celle de leur aïeux avant eux me jurèrent-ils, les lieux où j'avais vécu étaient inhabités et désolés. Ils me contèrent alors une légende, celle d'un homme du temps jadis qui avait demeuré là-bas, et qui partit subitement à la recherche du pays des fées. Nul ne le revit jamais, mais l'histoire raconte qu'après maintes péripéties il atteignit son but, fut accueilli par les créatures de magie et devint enchanteur à la cour de la reine du petit peuple. On dit aussi qu'un jour, satisfait de son existence, il reviendra finir ses jours en son foyer...
[NdlA: Asarlaí signifie magicien en gaélique ;) ]
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Mercredi 26 novembre 2008 à 2:08
Au réveil, je me suis empressé de prendre des notes, afin de ne pas oublier.
Et maintenant, je m'emploie à le retranscrire. Voici déjà la première partie, en espérant vous divertir.
Sortir du sommeil pour trouver le chaos. Ce sont les cris qui l'ont éveillé, plus que la cloche d'alarme.
Rendant grâce à son entrainement, il passe instantanément du repos à l'action. Inutile de se poser des questions sur le pourquoi de la situation. Ils ont été retrouvés, et l'ennemi entend bien leur faire payer...
Il passe en mode automatique. À gestes mécaniques, l'homme passe un minimum de vêtements, ceint dague et épée, puis s'engage en courant dans une coursive. Son objectif: le pont. Pressant le pas dans l'obscurité, il en croise d'autres qui comme lui se dirigent vers l'endroit où la bataille fait rage. Une pensée pour eux, une pincée de culpabilité. Quelque part, c'est à lui qu'ils doivent le sort qui leur est réservé, bien qu'ils s'y soient volontairement engagés.
Plus tard, plus tard, le temps des regrets n'est pas encore venu.
Il s'arrête un instant, au bas de l'échelle. Arrivés avant lui, des soldats improvisés montent déjà au combat. Quand vient son tour il grimpe rapidement, barreau après barreau, sentant les muscles de ses bras rouler sous sa peau. Une fois en haut, d'une poussée, il jaillit de l'écoutille, roule sur les planches, se relève. Dans le même mouvement il tire ses armes.
Du regard, il évalue la situation, ses yeux s'étant rapidement adaptés à la pâle lueur de l'aube. C'est un navire de guerre qui les a abordés, comme de juste. Pour en avoir entrainé beaucoup, il sait que les combattants qui leur sont opposés ne valent pas grand chose, trop habitués à la vie dans leur pays sans guerre, plus occupés à opprimer la populace qu'à lutter pour survivre. Mais il ne sous-estime pas la menace, car de son côté il ne dispose que d'une poignée de marins non aguerris. Jeunes, pour la plupart. Une lutte perdue d'avance... Chacun toutefois vendra chèrement sa peau.
Plusieurs assaillants ont déjà pris pied, défendant les cordes le long desquelles d'autres progressent. Il sait que cette tête de pont n'est là que pour assurer la mise en place de passerelles de bois. Après viendra le gros de l'armée, et les défenseurs ploieront sous le nombre. Aucun coup de canon n'a été tiré... si on ne désire pas les couler, c'est donc la capture qui est visée. Est-ce une chance ou une malédiction pour ses compagnons qu'il soit le seul à disposer des informations recherchées? Ça non plus il ne faut pas y penser.
Le tour d'horizon effectué, vient le temps de la boucherie. Accompagné des marins les plus prompts, il se précipite sus à l'ennemi. Le temps se fige juste avant l'engagement. Une seconde s'étire, qui restera gravée dans la mémoire des survivants. D'un côté, les soldats du royaume, tabard or et argent sur leurs protections légères. En position défensive, un cordon s'apprête à protéger ceux qui s'affairent pour monter à bord et semer la mort. En face d'eux, un groupe de marins dépenaillés, de bric et de broc équipés, portant épissoirs, haches, coutelas et épées, montant à l'assaut en hurlant pour se donner du courage.
C'est maintenant la curée. Les lames s'entrechoquent dans un fracas métallique. L'odeur cuivrée du sang chaud fraichement versé déjà emplit les narines tandis que retentissent les premiers cris d'agonie.
Changé en machine implacable, il pare, feinte, tranche et taille. Emporté par la vague de combattants, il avance vaille que vaille. Les coups sont précis, calculés pour tuer rapidement ou mutiler gravement avant de passer à l'adversaire suivant.
Au début de la bataille, c'est la fureur des marins qui l'emporte. La force de leur élan rompt la digue de soldats et leur permet de déborder le barrage d'acier. Quelques uns parviennent même à passer la ligne suffisamment vite pour aller trancher un cordage et faire choir une grappe d'assaillants dans les flots, bref coup d'éclat dont les auteurs sont généralement récompensés par un coup d'épée dans le dos avant même d'avoir pu savourer leur triomphe.
Puis au fil du temps, à mesure que l'ennemi s'organise, la tendance s'inverse. Les militaires sont de plus en plus nombreux, tandis que la quantité de défenseurs s'amenuise. Lorsqu'enfin les passerelles relient les deux navires, c'est terminé. Submergés, les marins ne peuvent que reculer. Les soldats se mettent en rang et progressent. Il cessent de tuer pour prendre un maximum de prisonniers.
« NAYM, SAUTEZ BON SANG, IL NE FAUT PAS QU'ILS VOUS AIENT! »
C'est le capitaine qui a crié. Un homme plein de bon sens, même s'il en a peut-être manqué en s'engageant dans cette aventure. Naym devrait tenir compte de son injonction, mais tout à son combat, il n'entend pas. Le capitaine alors, une épée dans chaque main, fonce vers lui dans la mêlée, sans prendre garde aux blessures qu'il reçoit. Tous deux se trouvent près du bord... Il n'y a pas à tergiverser. Avec dans le regard une lueur de regret, le capitaine achève l'adversaire de Naym, puis assomme ce dernier du pommeau de son épée et le passe par dessus la lisse.
« Désolé mon gars, mais ça vaut mieux, tu t'en rendras compte si tu survis. »
Tels furent les derniers mots que Naym entendit avant de sombrer...
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Dimanche 9 novembre 2008 à 4:22
Une histoire... Ce serait une grave erreur de croire que les histoires ont une vie évidente. Il en naît et il en meurt tous les jours. Certaines sont portées aux nues, d'autres trainées dans la boue. Il en est qui perdurent bien plus longtemps qu'une lignée humaine, mais pour une qui accède à la gloire, combien trépassent avant même d'avoir vécu? Je ne sais si les histoires sont le propre de l'Homme. Peut-être les chants des oiseaux colportent-ils des contes dont nous ignorons tout? Peut-être la hyène rit-elle parce qu'un de ses congénères lui en a raconté une bien bonne? Peut-être le chant des loups à la Lune porte-t-il une fabuleuse légende qui échappe à notre compréhension? Je suis un Homme, j'ignore donc tout cela.
Notre histoire à nous n'a pas encore débuté. Pour l'instant elle n'existe qu'en tant que possibilité, sillonnant l'éther aux côtés de ses consoeurs à la recherche d'un esprit propre à lui donner une tournure. Parfois, une de ses compagnes de route est happée par un hôte. Oh oui, elle en a déjà vu beaucoup partir ainsi vers l'inconnu. Elle ne peut qu'imaginer ce qu'elles deviennent ensuite. Sont-elles envisagées puis mise à l'écart d'un haussement d'épaule mental, mort-nées? Envahissent-elles un être à l'écoute mais trop peu talentueux pour leur donner une forme, qui s'usera pour accoucher d'une suite de mots imparfaite? Elle frissonne régulièrement à cette idée, mais ne peut qu'arpenter son chemin, attendre, et angoisser.
Quand soudain...
Soudain quoi au juste? Qu'est-ce qui a bien pu déclencher la subtile alchimie qui la pousse vers un réceptacle? De nombreuses choses en fait. Une association d'idées cocasse. Un paradoxe à exprimer. Un jeu de mot à illustrer. Une morale à appuyer. Une leçon à donner. L'envie qu'a eue un pauvre humain de prendre une expression au pied de la lettre...
Mais peu lui en chaut. Tout ce qui lui importe, c'est de savoir qu'elle a enfin été appelée à remplir sa fonction, et elle compte bien ne pas finir au tragique. C'est qu'elle est volontaire notre petite histoire! À peine arrivée à destination, elle s'ancre fermement et commence à sonder. Un esprit humain, quelle chose étrange. Tant d'éléments s'y entrecroisent! Apparemment, elle est tombée là en pleine heure de pointe! Autres histoires, idées, pensées, tracas, angoisses, sentiments, aspirations. Une petite voix lui souffle qu'elle se trouve dans le subconscient, et qu'elle doit se frayer un chemin vers l'étape suivante. Mais pour cela, elle doit devenir assez forte. Comment s'y prendre... Tiens, une idée intéressante qui n'a pas l'air trop pressée. C'est l'occasion de discuter un peu. Elle apprend que la vie ici peut être passionnante, et sans s'en rendre compte, elle s'enrichit au fil des rencontres, se construit une vraie personnalité. Par la même occasion, elle grandit, prend de plus en plus de place. C'était donc cela, la maturation!
Désormais, son logement lui paraît étroit. Il est temps de faire savoir au propriétaire qu'elle aspire à plus de liberté. Elle se fraie un chemin dans une foule de choses qui sont à présent toutes petites par rappport à elle. Puis elle parvient à un carrefour. Hum, la voie du rêve est tentante, mais elle a appris auprès d'une prémonition de passage que le résultat était souvent aléatoire. Non, pour elle se sera la grande porte, la voie directe vers la conscience. Il faudra sans doute bousculer pas mal de monde pour atteindre son but, mais elle se sent assez forte pour jouer des coudes.
Elle s'engage vaillamment sur le chemin. Sa progression lui semble lente, mais elle ne s'en tire pas trop mal par rapport à d'autres. Parfois, elle doit s'écarter pour laisser passer des nécessités pressées qui écrasent tout sur leur passage. Elle envoie bouler sans ménagement quelques tracas quotidiens qui peuvent bien se permettre d'attendre un peu. Profitant de sa légéreté d'historiette, elle double les contes, les romans et les épopées. Elle réussit même à passer devant un univers, qu'elle survole quelques instants en admirant sa formidable complexité. Si elle avait eut la patience d'attendre, peut-être aurait-elle pu prétendre un jour à un tel statut... Mais ce n'est pas le moment d'avoir des regrets, car la lumière se profile à l'horizon. La conscience, enfin!
Quand elle y séjournait, elle trouvait le monde nébuleux de l'inconscient très animé... elle découvre à présent que le conscient, c'est la fourmilière, la jungle! Ceux qui sont parvenus à grand peine jusque ici, comme elle, n'entendent pas se laisser souffler la place. Des processus mentaux trop compliqués pour son entendement règnent en maîtres sur le gisement d'idées. Gigantesques, ils observent tout le monde, jugent, entrainent certains élus vers leur destinée, renvoient les importuns dans les ténèbres... Et pendant ce temps tout le monde cherche à se faire remarquer, saute le plus haut possible, crie son importance. De l'intérieur, on a l'impression de se trouver au beau milieu du chaos le plus total. Le neuvième cercle de l'enfer à côté, c'est de la petite bière. Pourtant, elle se souvient du bref instant où elle a franchi la porte, lorsqu'elle a pu voir tout cela avec un peu de distance. Une mécanique complexe, bien huilée, d'une beauté indescriptible, voilà ce qu'elle s'était dit alors...
Elle sort de sa rêverie quand elle sent un regard posé sur elle. L'un des grands la tient sous ce qui lui sert d'oeil, et elle peut presque sentir tourner les rouages de la mécanique mentale qui la jauge. Ne pas se laisser intimider. Elle roule des métaphores devant lui, expose ses plus belles tournures. Vantant la légèreté de ses phrasés et l'originalité des idées qu'elle a glanées, elle se rend enivrante pour impressionner. Fond et forme, notre histoire se livre tout entière, délivre sa matière, pour se montrer hors normes. Victoire!
Toute fière, l'esprit maintenant serein, elle est emportée par le géant aux desseins-mystères vers un destin qu'elle espère resplendissant.
De notre côté, prenons de la hauteur, prenons du champ. Intéressons nous quelques instants à l'humain qui l'abrite. Toute la journée il a vaqué à ses occupations plus ou moins futiles, ignorant tout des péripéties de notre impalpable amie. Ce n'est plus le cas à présent. Il semble préoccupé, ses doigts le démangent. Il marche en long, en large, envahi de pensées étranges. Il lutte contre leur attraction, sachant avoir des priorités que d'aucuns jugeraient plus dignes de son attention. Peine perdue! Par les charmes de notre héroine il est vaincu. Il s'installe devant son clavier et, soulevant pléthore de claquements sonores en faisant mouche, ses doigts s'agitent au-dessus des touches. Au rhythme imprimé par ces dix soldats zélés, notre histoire est découpée, extirpée de sa gangue spirituelle, transformée, portée sur un nouveau support virtuel.
La manoeuvre est achevée, et l'histoire, vous l'avez lue. J'ose espérer qu'elle eut l'heur de vous plaire.
Sa vie ne fait que commencer, la suite je ne peux la conter. Oubli ou notoriété? À vous désormais d'en décider.
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Vendredi 7 novembre 2008 à 15:15
L'objectif de chacun de ces textes n'est pas d'écrire une véritable histoire, mais juste de présenter un univers et certaines de ses particularités, et je l'espère de piquer la curiosité du lecteur pour lui donner envie d'en savoir plus.
Jusqu'à présent, seuls trois d'entre eux sont publiés ici. Le premier n'a pas été présenté comme tel, et il est très antérieur à l'article. Il s'agissait de la relation, très courte, d'un rêve. (sous le titre inachevé) J'ai pensé le récrire, pour en faire quelque chose de plus conséquent mais... en fait il me plait comme ça ^^'
Bon, le second se trouve dans l'article où je lance l'idée. Le troisième n'a lui non plus pas été présenté comme tel, mais le fait est qu'il en fait partie, il s'agit de Guardian Angel, posté très récemment (bien qu'existant depuis très longtemps).
Je m'en excuse, cet article ne sera sans doute pas très intéressant pour vous, il me sert en fait à réorganiser mes idées de façon à ne pas partir dans toutes les directions à la fois ^^
Alors, j'ai attribué à chaque univers un "code" pour pouvoir m'y référer facilement dans ma tête et dans mes notes. Au départ je voulais en présenter sept: "la femme de glace" (nom de code du premier ^^), "le château", "les enfants", "sans lumière", "l'halfelin", "onirics" et "sans magie".
C'est en essayant de rédiger le texte de "sans magie" que j'ai finalement créé "monochrome" (le second texte posté), alors que les deux univers n'ont absolument rien en commun xD
"L'ange gardien", je ne l'avais pas retenu lors de ma préselection ^^' mais bon, l'inspiration du moment a fait qu'il est là maintenant.
"onirics" je le raye de la liste. Je l'avais déjà mentionné dans l'article inachevé (2), et je ne me sens toujours pas apte à m'attaquer à un tel morceau.
Hum, et bien voilà, j'ai un listing ^^ si je n'en découvre pas de nouveaux avant d'avoir fini d'écrire les autres, je devrais pouvoir m'en sortir xD
Bon, pour que vous n'ayiez pas lu tout ça pour rien, le lance quelques petites infos :P
"l'ange gardien", "sans magie" et "l'halfelin" montrent trois différentes façon de concevoir Faërie et ses rapports à notre monde, plus ou moins classiques (un de mes objectifs est de rester dans les "canons" de fantasy tout en trouvant suffisamment d'originalité dans les idées pour me démarquer. Ce qui n'est pas forcément évident étant donné le nombre d'auteurs et de livres qui existent ^^').
"les enfants" est très difficile à présenter en texte court et nécessite pas mal de recherches. Il est axé sur la thématique que j'avais lancée dans cet article. (d'ailleurs je remercie énormément ceux qui m'ont répondu! sachez que si vous avez de nouvelles idées à ce niveau, elles sont toujours les bienvenues!)
"le château" est un univers de science-fiction un peu... spécial. (et si je ne bifurque pas en route, c'est le prochain texte publié ;) )
Quant à "sans lumière"... il s'agit à la fois d'un univers et d'un exercice de style. Quand je me mettrai dedans, ce sera sans doute pour moi le plus gros défi d'écriture que je me serais jamais lancé. Rien que le texte court va me prendre un temps fou je pense, alors faire un gros travail dessus... ce sera sans doute intéressant ^^ Bon, je vous dis ça, mais je ne vous donne pas vraiment d'éléments pour vous rendre compte :P Un indice: pour cet univers, le nom de code est à prendre au pied de la lettre ;)
Allez, je cesse maintenant mon blabla, et je me mets au travail pour vous fournir quelque chose de plus consistant dans le prochain article ^^ bisous à tous!
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